Dévoilé en 2015, lors du 69e Festival d’Avignon, le système de surtitrage en réalité augmentée sur des lunettes connectées, a permis au public de suivre les représentations du Roi Lear et du Retour à Berratham dans sa propre langue et en temps réel. A l’origine de cette prouesse technologique, Theatre in Paris, société de tourisme culturel innovante, en partenariat avec Atos, société internationale de services en informatique et Optinvent, fabricant de dispositifs optiques.
Suivre le Roi Lear en anglais et en chinois, grâce à des lunettes en réalité augmentée, technologie capable de combiner le monde réel et des données virtuelles en temps réel, alors que la représentation se produit sous vos yeux dans une autre langue est désormais possible. Cette performance, très intéressante sur le plan technique, est aussi un plus culturel, comme le souligne Paul Rondin, directeur délégué du Festival d’Avignon : « Cette technologie ressemble au Festival, car elle offre un moyen de faire circuler les cultures de manière simple. Nous y croyons autant pour elle-même que pour le Festival. »
Comment ça se passe pour le spectateur ?
Concrètement, le système fonctionne comme les audio-guides dans les musées : le spectateur se présente à un guichet d’accueil et récupère les lunettes qui sont programmées sur la langue de son choix. Une caution et une pièce d’identité doivent alors être demandées. Par la suite, il lui suffit de chausser les lunettes pendant la représentation pour bénéficier du sur-titrage dans la langue choisie. « Les lunettes sont parfaitement transparentes, précise Carl de Poncins, co-fondateur de Théâtre In Paris. Le spectateur voit donc la scène normalement, et le texte « flotte » dans son champ de vision. » Evidemment, ce texte est imperceptible pour les autres spectateurs.
Et côté organisateur ?
« Nous installons dans la salle, après un audit des conditions techniques, un réseau WiFi dédié, fermé et sécurisé afin de transmettre les sur-titrages directement sur les lunettes et en temps réel. ». L’organisateur doit, de son côté, déterminer le nombre de paires de lunettes et prendre en compte les questions de stockage et de rechargement des batteries des lunettes. Enfin, l’organisateur doit organiser un bureau d’accueil où l’on pourra emprunter puis restituer les lunettes.
En tant qu’organisateur, de nombreuses questions affluent alors : quelles sont les langues disponibles ? Au cours de la représentation, qui s’assure du bon fonctionnement du système ?
« Nous produisons les surtitres dans toutes les langues souhaitées. Précisons que nos traducteurs sont spécialisés en traduction théâtrale. » Et, durant les représentations, un régisseur de la société Théâtre In Paris est présent pour gérer « le topage : il « envoie » les surtitres en synchronisation avec les acteurs, depuis une tablette de commande en régie. »
L’organisateur doit donc prévoir des coûts fixes d’investissement (matériel, installation et tests, contenus, c’est-à-dire les traductions dans les langues choisies par la production) et des coûts variables (licence d’utilisation du logiciel, coût du topage). Mais le bénéfice en termes d’image est considérable. « Il s’agit de la première application grand public au monde de lunettes de réalité augmentée », précise Carl de Poncins. Sans compter que cela permet d’accueillir un nouveau public, strictement additionnel.
Des perspectives à créer
« Dans notre stratégie globale, ce projet s’inscrit parfaitement à l’intersection des nouvelles technologies et du théâtre doublement millénaire, souligne Paul Rondin, directeur délégué du Festival d’Avignon. Il représente une bonne synthèse de la complémentarité de ces deux mondes, dont nous avons tous besoin. »
Outil pour les malentendants, animations 3D ajoutées, pluie, jeux de scènes augmentés… De nombreuses perspectives s’ouvrent désormais au spectacle vivant. « Nous avons une vingtaine de projets en discussion avec des institutions françaises et internationales pour les années 2016 et 2017, précise Carl de Poncins. Notre objectif est de déployer le système avec quelques clients pilotes qui bénéficieront des toutes dernières avancées, notamment des matériels allégés et pouvant être portés par dessus des lunettes de vue. »
Innovation technique au service du spectacle vivant, ces lunettes à réalité augmentée et connectées ouvrent de nombreux champs des possibles. A suivre donc… ou à inventer !